Les pêcheurs bretons au pays basque !

Recherches d’archives Jean Jacques PERES

On se croirait, à Saint-Jean-de-Luz, transporté en pleine Basse-Bretagne !

Saint Jean de Luz {De notre correspondant particulier). — Ce n’est pas l’agré ment du climat, ai-je besoin de le dire, ni la spendeur du paysage, ni davantage les souvenirs historiques qui s’attachent à Saint Jaen-de-Luz, où Louis XIV vint épouser Marie-Thérèse, et à Cibourre, port d’attache des anciens baleiniers du golfe de Gascogne, qui attirent ici, une colonde, plus nornbreuse à chaque. hiver, d’ouvrières et de pêcheurs bretons.

De novembre à la fin du mois, de mars, dans les ports de notre pays sardinier,, c est le chômage. Une ressource unique ou à peu près et seulement à la portée des plus vigoureux : la rude pêche d’hiver avec ses périls et ses maigres profits. Dans la baie de Biscaye, située en avant de Saint-Jean-de-Luz et de Cibourre, c’est au contraire dans le coeur même de la mauvaise saison, que le poisson afflue : la sardine en novembre, décembre et janvier ; le maquereau en février et en mars

L’exploitation d’un pays neuf

Quelques marins de Douarnenez, venus faire la pêche à Arcachon, il y a une quinzaine d’années, à l’époque où la crise de pénurie sévissait sur . le littoral flnistérien et qui eurent l’idée de pousser jusqu’ici, furent frappés de ce contraste.

A mesure qu’ils s’avançaient vers le Sud, ils avaient en outre l’impression de s’enfoncer dans un véritable pays neuf où presque tout restait à créer au point de vue de la pêche côtière. Quelques barques, d’ailleurs pas mal équipées du tout, prenaient bien la mer, ça et là, et suffisaient même à l’approvisionnement de la- consommation locale. .Mais aucune science, aucune méthode, aucun métier dans les procédés de pêche. On allait à l’aventure. Le seul indice par lequel on sut déceler 1a présence de la sardine, était l’apparition des bàivine marsouins devant qui l’on s’empressait de tendre de vastes filets tournants, engins redoutables, auxquels n’échappait rien de ce qui se trouvait dans leur rayon. Pour le maquereau, on coulait dix à douze brasses de lignes dans la profondeur et puis on attendait…

Les émigrants bretons firent figure de-novateurs parce qu’au lieu d’attendre ils s’efforçaient de « lever » le poisson, c’est-à-dire de le faire monter au moyen d’appâts divers, pour le capturer en surface.

Dans les ports vendéens les carentais, ils avaient éprouvé un matériel d’embarcation a moteur et tout un outillage moderne difficile à introduire actuellement chez nous, en raison des bouleversements ou’il y provoquerait dans IPS situations acquises. Ici, le champ se trouvait libre, outillage à grand rendement, mis au service de qualités professionnelles formées au cours d’une longue expérience héréditaire, donna les résultats que l’on pouvait augurer. Quatre-vingt à cent mille sardines, huit cent mille, et douze cents kilos de maquereaux sont couramment débarqués par une seule finasse, au retour de son voyage quotidien.

A l’appel d’une production qui croissait sans cesse, se créèrent les industries connexes : des usines se bâtirent tour La préparation de la conserve dans l’huile, le commerce de la marée se développa. Celui-ci est demeuré, jusqu’à présent, entre les mains des maisons indigène, desquelles la maison Urvoy-Berre, de Douarnenez, vient faire la saison depuis trois ans. Quant à l’industrie de la conserve, fondée ici par des maisons bretonnes, elle a gardé la physionomie d’une industrie bretonne, employant un personnel en grasse majorité composé de Bretons. Et je n’ai point parlé de la. réparation clos filets et « bauniches » qui offre de lucratifs et chaque jour plus vastes débouchés à l’habile activité de nos ouvrières.

« Ici, l’hiver, on gagne sa vie plus aisément et mieux que de nos côtés, me disait l’autre jour, un marin, sur le quai de Saint-Jean de Luz. Avant quelques années, nous serons si nombreux que ce port-ci sera devenu comme un port breton ».

La colonie bretonne

Qu’est-il même encore besoin d’attendre ? En pénétrant, à de certaines heures, dans les quartiers qui avoisinent ce port de Saint-Jean de Luz et de Cibourre, on a bien l’impression de se trouver subitement porté en pleine Basse-Bretagne à chauqe pas, l’on croise des groupes de pêcheurs aux vêtements tannés ou de femmes aux gracieuses coiffes blanches qui s’expriment en langue bretonne. Et si le coquet bonnet de tulle que l’on porte avec tant d’élégante distinction n Douarnenez, Tréhoul, Audierne et Concarneau est celui qui domine, ainsi qu’on pouvait s’y attendre, on rencontre pareillement la « bigoudène» hiératique du Guilvinec et de Saint-Guénolé, la conque austère des filles du Cap, la majestueuse fouénantaise, la « bourléden » étrln’uée et môme les velours . Les bigarrures des alentours de Baud et du Faouët. On dirait un microscosme où les divers pays de l’Armor seraient représentés.

Que rharmonf«Mi?e fraîcheur de tous ces costumes a ici de fiédùctiori « t combien, au milieu de la commune banalité, on en apprècie le bon goût.

Le bilan de la campagne

Essayons de dresser le bilan de la campagne qui s’achève :

Passif : deux sinistres : la perte des pinasses Araok-Atao, à M. Constant Hélias, de Douarnenez et Petite-Bretonne, à M. Bescon, de Tréboul

Victime d’une panne de moteur, la première fut emportée par la bourrasque et réduite en pièces. La seconde a péri dans un focÀ» die consécutif à une explosion de son moteur, aucune perte de vies humaines à déplorer ! ».

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